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Laboratoire de Sfax 1


Le petit laboratoire de biologie marine en 1905 en direction du large.
(Cliché A. Allemand)






Le laboratoire de biologie marine de Sfax







Dans sa thèse de doctorat, Antoine Allemand dit Allemand-Martin, qui en fut le sous-directeur, présente quelques clichés qu’il en a pris.
Il en donne la description que nous retranscrivons ci-après :

« Dans sa construction, on ne s’est préoccupé que de la solution pratique des questions relatives aux éponges. Ce n’est donc pas un laboratoire ouvert aux personnes qui se proposent d’étudier les diverses branches de la biologie marine et encore moins un laboratoire pédagogique ou d’enseignement biologique. Il est situé à 1.500 mètres au large du port de Sfax, à l’est du chenal d’accès au port. Cet emplacement a été choisi pour avoir toujours des eaux vives, exemptes des souillures du littoral et un fond convenable. Actuellement, c’est seulement une maisonnette en bois construite sur pilotis et émergeant de la mer comme un îlot. Elle se rapproche, mais avec un aspect plus élégant, des petites maisons que l’on construisait autrefois pour le lavage des éponges, d’après P. Gourret. 

Il ne mesure que 9 mètres de long sur 5 mètres de large. Son grand axe est nord-est 30 degrés, à peu près. Par sa grande face ouest, il est parcouru par une galerie munie d’un escalier servant de débarcadère. Deux fenêtres et une porte donnent sur cette galerie. Deux autres fenêtres sont percées dans la grande face opposée. Dans la partie gauche du bâtiment se trouve un réservoir en ciment armé de 6 m3, construit sut pilotis indépendants, servant à l’alimentation des bacs-aquariums, au nombre de 5, rangés le long de la paroi est. Près du réservoir, du côté ouest, se trouve une petite pompe à main, facilement mise en action par le gardien du laboratoire et servant à remplir le réservoir.







Le laboratoire de biologie marine 2



Ce même laboratoire en 1906, vue en direction de la ville que l'on aperçoit au fond.
(Cliché A. Allemand)







Dans l’autre coin (côté est), se trouve le maréographe enregistreur, et la grande salle de travail, complètement indépendante du couloir de service, du réservoir et du maréographe. C’est l’unique salle du laboratoire, mais elle est assez spacieuse et bien éclairée par deux fenêtres opposées l’une à l’autre. Sur la paroi du fond sont rangés cinq bacs-aquariums complètement en verre, recevant l’eau de mer du réservoir. Ils sont installés dans une grande cuvette qui reçoit l’eau du trop-plein et l’envoie à la mer. Une grande table de marbre, deux tables de pitchpin forment l’ameublement avec un petit lit pliant placé dans un angle. Trois étagères superposées servent à contenir une sorte de musée des éponges et la petite bibliothèque. Une autre grande étagère, un petit fourneau à pétrole, un baril d’eau douce et un porte-manteau complètent l’installation. 







Appareils de spongicultureAppareils de spongiculture



A gauche : appareils de spongiculture par fragmentation.
A droite : vue du dessous du laboratoire au moment de l’examen d’un appareil.

(Cliché A. Allemand)






Pour éviter l’humidité, il y a un double plancher au-dessus du fond du laboratoire ; le supérieur est ciré et recouvert de nattes d’alfa.
Le dessous de l’établissement, entre les pilotis, a été transformé en véritable jardin sous-marin. C’est là qu’on a installé les appareils variés essayés comparativement pour la spongiculture soit par fragmentation, soit par germes. On circule entre l’eau et le fond du laboratoire sur des madriers d’où l’on peut, à l’aide de la « lorgnette d’eau », examiner tout ce qui se passe dans le jardin sous-marin.
Le gardien arabe, un kerkennien, est un des meilleurs plongeurs à nu de la contrée et il s’entend à merveille pour soigner les cultures sous l’eau et pour les surveiller. »
.


Carte emplacement labo





A. Allemand montre une planche représentant les régions sous-marines de Sfax et des îles Kerkennah.
Une ligne y est matérialisée qui, partant de la bouée N° 5 sur la droite, passe par le laboratoire sur la gauche.
Une seconde planche représente la courbe et la coupe des fonds marins le long de cette ligne.







Fonds marins






L’espace en dessous du laboratoire, qui reposait sur des pilotis plantés sur le fond marin, fut réservé aux expériences théoriques les plus délicates, demandant le plus de soins et enfin pouvant être à l’abri de la curiosité. En dehors de cette zone de jardin sous-marin, fut choisi un cantonnement de 450 m sur 350 m, limité par des piquets surmontés de voyants interdisant la circulation et la pêche dans ce périmètre. L’endroit où reposait le laboratoire était très favorable à l’éponge (courants de marées, sol, végétation et faune, ombre et température).
Il fallut cependant envisager la construction d’un brise-lames et des moyens pour préserver les expériences. D’abord furent installés de grands barils dans un rayon d’environ 10 m, avec de grandes caisses, et du gravier amené par quelques barques fut également vidé à environ 30 m au sud-ouest du laboratoire. Ces moyens s’étant révélés inefficaces, l’Administration dut intervenir pour construire un véritable brise-lames (visible sur la photo prise en 1906), afin de protéger les nouvelles installations, la plupart des appareils ayant été détruits lors d’une tempête.





Drague gangave



La drague-gangave modifiée du laboratoire.
(Cliché A. Allemand)








Pour ses études A. Allemand avait besoin d’éponges vivantes qu’il se procurait par diverse méthodes de pêche qui ne les blessaient pas. Son laboratoire avait, en particulier, réalisé une drague-gangave qui était utilisée à partir du navire garde-pêche « Cachalot ».
 
Dans la thèse, il est rapporté que les récoltes réalisées à l’aide de cet ustensile n’ont pas répondu aux attentes, en raison de son poids trop faible, qui ne pouvait pas être accru en raison de la difficulté qu’avait l’unique marin préposé à sa manipulation et son retrait de l’eau.
Concernant ce laboratoire, qui fut utilisé par A. Allemand pendant 3 ans pour des études sur les éponges, il est écrit dans la thèse de cet auteur « qu’il serait désirable que cet établissement fût transformé et rendu permanent, en raison de la multiplicité et de l’importance des recherches biologiques à entreprendre dans le sud tunisien. ».
Qu’en fût-il ? Il est très probable que lors de l’agrandissement des installations portuaires vers 1924-1925 il ait été démoli, si cela n’avait pas déjà été fait.


Ceci est le dernier texte de Gérard Bacquet décédé en avril 2014.