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Quand
les paquebots faisaient escale à Sfax |
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Nous distinguerons trois époques
différentes :
a) avant l'achèvement en 1897 d'un port digne de ce nom permettant
l'accostage de navires d'un tirant d'eau atteignant 6,50 mètres ;
b) la période 1897 - 1912, cette dernière date marquant la mise en
service par la CFT de la liaison ferroviaire Sousse -Sfax, mettant cette
dernière ville à 6 heures de la capitale Tunis ;
c) après 1912.
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Première époque
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Les
navires qui, au départ de la France, faisaient escale à Bizerte,
Sousse, Sfax puis continuaient jusqu'à Tripoli, mouillaient en rade. Le
transbordement des passagers se faisait en barque.
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Le guide Joanne de
1891 - 1892, édité par L. Piesse,
donne une idée des tarifs demandés
en ce qui concerne Sfax.
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La
compagnie italienne Florio - Rubattino desservait les mêmes escales,
mais au départ de Gênes. Dans un précédent article (DS 38 2004, pp
82,83), nous avions présenté un extrait d'une conférence donnée par
M L. Piesse lors de l'inauguration solennelle du Musée d'Oran en 1885.
Il y décrivait le voyage qu'il avait fait à bord du "Dragut", du
nom d'un amiral turc qui était l'un des plus célèbres corsaires de
l'Empire ottoman, et qui fut tué en 1565 par un boulet de canon lors du
siège de Malte. Nous n'avons pas pu trouver la moindre information
concernant ce navire. |
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Deuxième époque
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L'
"Eugène Periere" au large.
(CPA LL n°70 - Coll. G.
Bacquet)
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Les navires assurant les liaisons France -
Tunisie ou Italie - Tunisie, étaient d'un tonnage supérieur à celui
du "Dragut" ou de ses équivalents, et ils accostaient au quai du
commerce. Le premier dont nous avons trouvé trace, car cité par P. Rey lors
de son voyage d'études en Tunisie, est "l'Eugène Pereire". Ce
navire de la Cie Générale Transatlantique, construit en 1888 était
long de 103,5 m.
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"L'Eugène
Pereire" dans le port d'Alger.
(Photo Detroit Publishing Co.,sous
licence de Photoglob Zürich - Domaine public) |
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Il avait quatre sister-ships dont le
"Général Chanzy", mis en service en 1891, long de 106,5 m et qui
resta en service de 1892 à 1910. P. Rey en montre une image,
intitulée, sur le pont du "Chanzy" au large des côtes tunisiennes.
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Sur la
plage arrière du "Chanzy".
(Photo Acary et Reymond - Voyage d'études en
Tunisie de R. Rey - Coll. Ch. Attard)
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Beaucoup plus intéressante est la photo
ci-dessous où l'on aperçoit un tout petit bout de ce même navire,
amarré au quai de commerce de Sfax. |
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En
1905, à l'arrivée du bateau "Général Chanzy". Foule sur le quai de
Sfax.
Photographie de Paul
Lancrenon (1857-1922) Ministère de la Culture (France) -
Médiathèque de l'architecture et du patrimoine - |
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Ce navire ne possédant pratiquement pas de
superstructures, n'est pas très élevé au dessus du niveau de l'eau.
Au vu de la hauteur de l'échelle de coupée par rapport au quai, cette
photo a dû être prise à marée basse. Sur le quai on voit de nombreux
personnages avec de belles tenues. Ce devaient être des accompagnateurs
de voyageurs déjà embarqués, ou bien des amateurs de spectacle
gratuit venant se montrer. Sur les fiches techniques de ces paquebots le
nombre de passagers transportables n'est pas indiqué : mais d'après
nous, le nombre de cabines à bord n'étant pas énorme, s'il montait 200
passagers à bord, c'était bien le maximum. A titre d'exemple, lors de
son naufrage, suite au heurt d'un récif et à l'explosion subséquente
de sa chaudière, le 10 février 1910 au NE de l'île de Minorque, il y
avait 160 personnes (passagers et membres de l'équipage) à bord du "Chanzy". Il n'y eut qu'un seul survivant.
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Au-dessous du logo de la Cie Générale
Transatlantique sont reportés les horaires de partance des bateaux au
départ de Marseille, et pour Marseille (année 1910).
Un voyageur ayant fait le trajet Tunis - Sfax à bord du paquebot
"Ville de Madrid" (de la CGT) a écrit à sa famille qu'il
était arrivé à destination le lundi 15 juillet 1907 à 10.30 heures.
Par référence aux horaires ci-dessus, ce paquebot a dû repartir pour
Marseille via Tunis dans l'après-midi.
Sur l'image
suivante, on peut voir le paquebot "Ville de Bône" de la susdite
Compagnie, dans le port de Sfax (quai de commerce). Ce bateau mis en
service en 1880 était long de 95,10 m et avait subi une refonte
complète en 1889 - 90, cette refonte étant antérieure à la photo. |
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Le
"Ville de Bône" à quai à Sfax.
(CPA LL. n°18 - Coll. G. Bacquet)
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Le paquebot que l'on voit sur la photo
suivante appartient lui aussi à la Cie Générale Transatlantique,
c'est sans aucun doute un sister-ship de "l'Eugène Pereire", à moins que
ce ne soit ce dernier : il est impossible de lire le nom qui est inscrit
sur la poupe.
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(CPA Geiser n°3 - Coll. G.
Bacquet) |
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On remarque, derrière le feu de port, la
longue queue des personnes attendant, qui l'embarquement, qui de voir
partir le bateau.
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Une autre Compagnie de navigation française était en
concurrence avec la CGT (la " Transat "), il s'agit de la
Compagnie de navigation mixte. Les cheminées de ses bateaux étaient
entièrement peintes en noir, alors que celles de la " Transat
" étaient bicolores : une petite bande noire en haut, et tout le
reste en rouge. Sur une photo en noir et blanc, c'est, nous en convenons,
difficile à apprécier.
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(CPA Gaulis n°36 - Coll. G.
Bacquet et LL n°80 - Coll. Ch. Attard)
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Sur la photo du haut, "le Rhône", de la
Cie de navigation mixte, est à quai. Sur celle du bas, il est bien
engagé dans le chenal, néanmoins le pilote du port est encore à bord,
car la " flouka " qui doit le ramener à quai, est toujours
amarrée au flanc du navire. En ce qui concerne les horaires des bateaux
de cette compagnie, ils sont donnés dans le tableau présenté
ci-dessous, avec les tarifs pour l'année 1910.
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Pour la Compagnie italienne Florio -
Rubattino, je n'ai pas pu trouver les horaires et les prix dans les
documents en ma possession. Mais je présente néanmoins la photo d'un
de ses paquebots, "l'Adria", prise dans le port de Sfax. A sa poupe on
distingue bien le pavillon italien, et son nom et son port d'attache
sont bien visibles. Au point de vue de ses caractéristiques (longueur,
tonnage), on peut avancer qu'elles sont dans le même ordre de grandeur
que celles des paquebots français présentés ci-dessus.
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L'
"Adria" à quai à Sfax.
(CPA Chabert n°4 - Coll.
C. Attard)
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Troisième époque
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Il était plus commode, et plus rapide,
d'aller en train à Tunis et d'y prendre le bateau. Néanmoins de gros
paquebots ont jeté l'ancre dans la rade et, comme l'a montré un
article de M. Ozanne publié dans notre revue, le transfert des
passagers d'un navire allemand étant dans ce cas, s'était effectué à
bord du premier remorqueur (à roues à aubes) de la SFEM. La photo
suivante montre un navire français, étiqueté à tort paquebot, car il
s'agit en fait d'un cargo qualifié de mixte, parce que possédant une
dizaine de cabines pour passagers. Le nombre de canots de sauvetage y
étant supérieur à celui d'un cargo normal (ici 6 au lieu de 4).
"L'Henri Estier", puisque c'est de lui
qu'il s'agit, est, vers 1924 (la marquise du quai de commerce est en
place), en train de charger des fûts d'huile dans ses quatre cales
(deux à l'avant et deux à l'arrière). En conséquence, il n'y a pas
beaucoup de monde sur le quai.
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L'
"Henri Estier" à quai à Sfax.
(CPA EPA n°12 - Coll. G. Bacquet)
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Cette étude de Gérard Bacquet a fait l'objet d'une publication dans
la parution de 2010 de la Diaspora Sfaxienne.
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La
carrière du "Ville
de Bône"
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Le
"Ville de Bône" sort du port de Sousse.
(CPA LL. n°2 - Coll. C.Attard) |
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Le "Ville de
Bône" inaugure son service le 9 juillet 1880 sur la ligne La Calle - Bône-Tunis et
repart le 27 vers
Alger, avant sa réception technique officielle.
L'année suivante, il prend part à l'expédition de Tunisie.
D'août
à novembre 1886, il change ses chaudières à Marseille et, de septembre 1890 à
janvier 1891, à Penhoët, il reçoit l'électricité
et une machine à triple expansion.
En février 1890, par gros temps après avoir renoncé à chercher un
abri à Gabès, il est refoulé par les Turcs de Tripoli et finit par
se réfugier à Malte.
En 1915, il est transformé en cargo.
Le 27 novembre 1916, il repousse l'attaque d'un sous-marin.
En 1926, 40 000 francs sont débloqués pour d'ultimes travaux de
modernisation que l'état du vieux serviteur méritait encore.
Après avoir fait une
très longue et heureuse carrière de plus de cinquante ans, entièrement
sur les lignes d'Afrique du Nord, il est finalement vendu à la démolition
à La Seyne, le 20 février 1931.
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